MYÈTHES

Oui, j'ai une dent contre la police française, et pas une petite dent, une grosse, la molaire du fond. 
J'en ai vu beaucoup de trucs anormaux avec eux dans ma jeunesse. Ce dont ils étaient capables. 
Mon pire traumatisme, quand j'y repense, j'en tremble encore, ce fut la fois où j'ai vu débarquer chez moi, vers 6 heures du matin, (il faisait encore nuit dehors), mon meilleur ami de l'époque Khattab. Je devais avoir dans les 25 ans et lui la petite trentaine. 
Je dormais, j'entends sonner, surprise par l'heure matinale, je me lève dans le noir, je vais ouvrir... Là,  j'ai eu le choc de ma vie. c'était Quasimodo en personne. J'ai eu très peur, j'ai poussé un putain de hurlement ! 
_ Ne panique pas, ne panique pas, c'est moi Khattab.
_ Khattab !!! C'est toi ? Mon Dieu ! Mais qu'est-ce qui t'es arrivé ? Rentre vite t’asseoir. Mais c'est horrible ta tête ! 
_ Ouais je sais, j'ai une sale gueule... 
_ Mais qui t'as fait ça ? Faut qu'on aille porter plainte à la police ! 
_ Hmmm ce n'est pas une bonne idée, c'est leur oeuvre. A l’hôpital, ils m'ont dit de rester sous surveillance, mais Je ne pouvais pas aller chez mes parents. Si ma mère me voit dans cet état, elle va faire un malaise.
_ Mais ce n'est pas possible ! Qu'est-ce qui s'est passé ? 
_ Je ne sais pas trop, c'était deux heures du matin, j'attendais que Trésor ferme son Pub. Des flics sont arrivés en courant, m'ont menotté, entraîné vers leur fourgonnette. Trésor leur gueulait : '' il est avec moi, il est avec moi '', rien à foutre. Ils m'ont passé à tabac dans la fourgonnette. Ils m'insultaient : '' Sale bougnoule tu vas crever ! On va tous vous crever ! '' Y en a un, je te jure, il en bavait le mec. A la fin, j'en ai eu tellement marre de prendre des coups et de me faire insulter que je leur ai dit : ''  Eh bien tuez-moi qu'on en finisse. '' Bizarrement ça les a calmés. Ils ont dû réaliser ce qu'ils avaient fait, car ils m'ont amené à l'hôpital en me disant de la fermer. 
_ Mais pourquoi ils ont fait ça bordel ! 
_ Je n'en sais rien du tout. Ils ne m'ont pas donné d'explication... Ils ne m'ont même pas demandé ma carte d'identité d'ailleurs. J'étais peinard devant le troquet, à fumer ma clope, le temps que Trésor finisse de ranger... Ils avaient dû avoir un problème dans la soirée avec un arabe je suppose... Ils se sont vengés sur moi. Le premier qu'ils ont croisé, pas de bol c'était moi... 
_ Mais c'est pas possible ça ! C'est pas possible ! Il faut qu'on aille porter plainte ! 
_ Où ça ? Chez les flics ? Tu m'excuses hein, mais je les ai assez vus pour cette nuit. J'ai eu mon compte.
_ On va dans un autre commissariat ! Je reste tout le temps avec toi, ils n'oseront pas... 
_ Non non non, je ne prends pas ce risque. J'ai déjà 15 points dans la tête, presque autant à l'arcade et au menton, ça va, je suis assez recousu comme ça. En plus en représailles, ils pourraient s'en prendre à ma famille. Je ne veux pas prendre ce risque. 
_ Mais mais... SOS racisme.. 
_ Aïe ne me fais pas rire. 
Je tremble, j'ai les mâchoires bloquées, je pleurniche, je sanglote... Je voudrais tuer quelqu'un. Il est méconnaissable, défiguré. Ils auraient pu le tuer.
_ La la, arrête de pleurer, ça va aller. 
Khattab me frotte le dos, me console, me serre dans ses bras. 
Chut chut lala, ça va aller, ça va aller, pleure plus. Je suis désolé de te faire ça.''